Mousquetaire #1

Réalisé par Romain Humeau & Nicolas Bonnière. Enregistré au Studio des Romanos par Romain Humeau et Nicolas Bonnière. Enregistrement additionnels : Frédéric Jakubiac & Estelle Humeau.
Mixé par Romain Humeau. Masterisé à Globe Audio par Alexis Bardinet.
Ecrit, composé et arrangé par Romain Humeau.
Artwork & photos : Marie D’Angleville.

Depuis le premier album d’Oobik & the Pucks, en 1996, Romain Humeau est demeuré fidèle à la ligne qu’il s’était fixé : celle d’une exigence sans concession. C’est elle qui lui a permis de traverser les projets avec autant de soin que de fraîcheur. L’homme a été capable de se remettre en question et de se réinventer régulièrement au cours de ces deux dernières décennies. La dernière de ses incarnations n’est pas la moins fascinante. Ce premier volume de ‘Mousquetaire’, nouvel album solo du musicien, montre les ressources inouïes dont dispose cet artisan. Après plus de 900 concerts, cinq albums d’Eiffel écoulés à plus de 200 000 exemplaires et le succès de ‘A tout moment’, disque d’or, il a investi son studio pour y confectionner un album aux accents pop. 

« Le travail sur ce disque a été amorcé au sortir de la dernière tournée d’Eiffel » explique Romain Humeau. Avec un seul mot d’ordre : explorer de nouveaux territoires. « Je me suis employé à faire tout ce que je m’étais interdit de faire » explique-t-il. Au-delà du pied de nez, un tel programme a obligé le touche à tout à aller puiser dans des recoins vierges de son inspiration. Cet amoureux du processus créatif y a pris un plaisir immense. Dans l’intervalle séparant les prémisses de ce disque et sa sortie, Romain Humeau s’est employé à multiplier les collaborations. On lui doit la réalisation de deux disques de Bernard Lavilliers : l’album original « Baron Samedi », en 2013, sur lequel il compose 3 titres et le recueil « Acoustique », l’année suivante. On lui doit également la composition de la musique d’une adaptation de « Vendredi ou les limbes du Pacifique » de Michel Tournier avec Denis Lavant en récitant. Un spectacle diffusé sur France Culture, joué dans le cadre du festival d’Avignon et qui sera repris à partir de janvier 2017 avec Bernard Lavilliers puis Denis Lavant. Dans le passé, Romain avait déjà contribué avec bonheur à des arrangements des morceaux de Noir Désir, Têtes Raides, Dominique A ou The Divine Comedy. 

Projet aux accents délibérément pop, Mousquetaire prolonge une des obsessions du compositeur depuis ses débuts : jeter un pont entre vocabulaire musical anglo-saxon et culture de l’écrit en langue française. Pour l’occasion, l’homme a renoué avec le pan le plus britannique de ses influences : l’écriture de Lennon-McCartney, de Bowie, d’Andy Partridge (XTC) et de Damon Albarn. Une manière de renouer avec sa culture musicale d’origine : le baroque. « Mon père est facteur de clavecins, je dormais juste à côté de son atelier. J’en ai développé une passion pour l’harmonie et le contrepoint » explique Romain. Sur Mousquetaire, le chanteur s’est autorisé à chanter dans la langue des Beatles, pour la première fois depuis bien longtemps. Ce mélodiste ultra prolifique s’est aussi permis d’explorer la moindre bribe mélodique survenue. « Depuis l’âge de 11 ans, mon ambition est de devenir un bon auteur-compositeur. J’ai jeté beaucoup de compositions dans ma vie, mais, sur cet album, j’ai souhaité retrouver ma pulsion mélodique enfantine. » Anti-star par excellence, Romain Humeau s’y incarne en artisan  méticuleux galvanisé par une liberté infinie. Une nouvelle approche qu’il attribue au tournant de la quarantaine, pris il y a quelques années. « J’aurais pu faire ce disque à l’âge de 20 ans si je ne m’étais pas mis autant de barrières » reconnaît-il, libéré. Romain Humeau a veillé à développer un thème particulier sur chacune des chansons de Mousquetaire. Ainsi, Paris est une petite pique adressée à notre capitale. « Qui aime bien, châtie bien » dit-il, narquois. 

C’est à Bordeaux, près du Sud-Ouest où il a grandi que Romain Humeau a installé sa famille et disposé son studio. Un local de 120m2 avec 4 m sous plafond qu’il surnomme son « petit Abbey Road. » C’est là qu’il a enregistré Mousquetaire, aidé dans sa tâche par Nicolas Bonnière à la co-réalisation. Avec un impératif commun : « utiliser le passé de la façon la plus moderne possible. » Disciples des productions de Geoff Emerick, Dan The Automator et Danger Mouse, les deux compères ont mis au point un son organique qui incorpore de nombreuses surprises électroniques. En plus du chant, il a joué la grande majorité des parties instrumentales du disque, passant avec aisance de la batterie à la guitare avec des détours par la basse ou à toutes sortes de claviers. Quelques invités ont complété l’ensemble : Estelle Humeau (piano, flûte, contrebasse), Joe Doherty (cordes), Ella Doherty (chœurs) et Nicolas Bonnière en co-pilote omniprésent. « On a fait les choses à notre manière » explique Romain Humeau avec modestie. 

Frais et érudit à la fois, Mousquetaire constitue une des plus belles réussites d’un surdoué qui se réinvente avec beaucoup de finesse. « Je n’avais jamais chanté aussi peu fort de ma vie. C’est la première fois que je susurre sur un album, ce que je fais tout le temps chez moi quand j’ai la guitare à la main. » Comblé, Romain Humeau fourmille déjà de projets. Le deuxième volume de Mousquetaire d’une part (30 titres ont été enregistrés), mais aussi un nouvel album d’Eiffel, déjà écrit, qui comblera les « ahuris », communauté de fans à la ferveur impressionnante. « J’ai encore plus envie de faire des choses qu’il y a 20 ans » annonce-t-il. On le suit.